Synopsis
Eve, une jeune femme de 21 ans, se retrouve séquestrée par un inconnu dans la cave d’une maison. Elle parvient toutefois à se libérer et à immobiliser son agresseur. Alors qu’elle est sur le point d’accomplir sa vengeance, elle découvre que l’homme retient captives quatre autres jeunes femmes dans des maisons séparées. Tiraillée par son désir de vengeance et la volonté de sauver les jeunes femmes, Eve décidera de les libérer une à une. Mais son plan ne se déroulera pas comme prévu et Eve devra faire face aux conséquences de ses actes…
Critique
Bound to Vengeance appartient au genre décrié du Rape and Revenge, un genre particulièrement sordide qui met en scène l’agression sexuelle d’une jeune femme et la revanche de la victime ou de ses proches. Les plus éminents représentants de ce genre sont bien évidemment La dernière maison sur la gauche de Wes Craven (adaptation libre de La Source d’Ingmar Bergman) ou I spit on your grave de Meir Zarchi. Deux films qui, par la brutalité de leurs scènes, ont acquis le statut controversé de film culte. Si Bound to Vengeance reprend les grandes lignes du genre, il en propose toutefois une version revisitée en l’expurgeant de ses scènes les plus malsaines. Le film commence en effet alors que l’héroïne est déjà retenue captive, nous épargnant ainsi les séquences de sévices sexuels éprouvantes. En quelques minutes, la jeune femme se libère des chaînes de son agresseur et se retrouve en position de force, munie d’un revolver et prête à faire feu.
Cependant, le jeune réalisateur, José Manuel Cravioto, introduit un enjeu qui va retarder l’accomplissement de la vengeance de la jeune femme et enrayer la mécanique bien huilée du Rape and Revenge. Eve apprend que quatre autres femmes sont retenues captives dans des maisons séparées et que, s’il elle tue son agresseur, elle les condamne ipso facto. Un dilemme moral qui conduit notre héroïne à passer un pacte avec son agresseur : partir à la recherche des filles séquestrées et les libérer, en échange de quoi elle s’engage à conduire l’homme à l’hôpital (le mec morflera tout au long du film…). Cependant, dès la première maison, la libération de la jeune femme virera au drame sanglant. La jeune prisonnière, affolée et brisée psychologiquement, tentera de s’enfuir mais finira par maladresse embrochée sur le pic d’une clôture… La seconde tentative se révélera tout aussi infructueuse puisqu’Eve sera confrontée à une femme souffrant du Syndrome de Stockholm. Cette succession de déboires, empreinte d’humour noir, est volontairement outrancière et détourne avec dérision la figure archétypale de l’empowerment féminin. Cependant, après la troisième libération, le film prend un tout autre tournant et adopte un ton premier degré qui ruine tous les efforts d’originalité menés jusqu’à présent.
C’est ce contraste de ton qui constitue la principale faiblesse de Bound to Vengeance. Le réalisateur semble ne pas assumer le ton développé dans la première partie et fait brutalement machine arrière pour nous offrir à l’arrivée un film très premier degré, mâtiné d’un sentimentalisme sirupeux. Le film abuse notamment des scènes de flashbacks amateures, filmées par le petit ami d’Eve dans un parc d’attraction. Un procédé redondant qui a pour objectif d’accentuer le contraste entre un passé idyllique et innocent, et un présent brutal et nihiliste. Ces scènes servent ainsi à marquer la métamorphose de l’innocente Eve, jadis apeurée à l’idée de monter dans une montagne russe. Mais leur récurrence laisse entrevoir une révélation finale que l’on devine très rapidement. Car loin de la simplicité de la première partie, la seconde moitié du film s’enferre dans une surenchère de révélations décevantes et clichées.
Un manque de simplicité que l’on retrouve dans la réalisation excessivement stylisée de José Manuel Cravioto. Le jeune réalisateur multiplie les effets de ralentis-accélérations chers à Zack Snyder et sa horde de Spartiates bodybuildés. Des tics stylistiques ampoulés et inutiles, accompagnés d’un montage nerveux et d’une BO pop rock sans intérêt. Les acteurs sont toutefois dans l’ensemble convaincants, notamment la jeune Tina Ivlev (Eve) qui parvient à rendre crédible les deux versants psychologiques du personnage.
Bound to Vengeance fait partie de ces films qui recèlent un réel potentiel mais ne parviennent pas à l’exploiter pleinement. Le film démarre sur les chapeaux de roue, offrant des scènes cyniques et jouissives, mais finit par se ranger sagement dans un schéma convenu. José Manuel Cravioto détourne les codes du Rape and Revenge pour mieux les asséner par la suite. Une simple velléité de transgression qui s’avère en fin de compte d’un grand classicisme.
55
10
NOTE
Informations
Bound to vengeance
Titre original : Bound to Vengeance
Réalisation : José Manuel Cravioto
Scénario : Rock Shaink Jr., Keith Kiornes
Casting : Richard Tyson, Tina Ivlev, Bianca Malinowski…
Pays d’origine : Etats-Unis
Genre : Rape and Revenge
Durée : 93 minutes
Date de sortie : 11 novembre 2015 (Etats-Unis)